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http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/la-cour-des-comptes-ereinte-la-98715par cti41 mardi 9 août 2011 -
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La Cour des comptes éreinte la gestion des forces de sécurité, le ministère de l’Intérieur est furieuxDans un rapport publié le 7 juillet, la cour des comptes remet en cause la gestion des forces de sécurité et met en doute la baisse de la délinquance depuis 2002, date de l'arrivée de Nicolas Sarkozy à l'Intérieur. Ce faisant elle entraîne la colère du locataire de la place Beauvau. Ces doutes remettent également en cause la politique du chiffre et les conditions de leur recueil.
Dans ce rapport de 250 pages, les sages indiquent avoir mené leur enquête dans une cinquantaine de villes d'Ile-de-France, Rhône-Alpes ou Paca. Ils passent au crible les forces de sécurité publique (SP) qui agissent dans la rue en particulier police et gendarmerie (80.000 fonctionnaires chacune). Nous sommes loin de 105000 gendarmes évoqués il y a quelques années.
Sur la période 2002-2010, écrivent les rapporteurs, l'Etat ''a consacré à la sécurité des moyens croissants budgétaires, technologiques et humains''. Mais, les résultats sont ''contrastés'', si l’on constate un ''recul des atteintes aux biens'' on déplore une ''hausse'' des violences aux personnes.
L’exigence d'une plus grande efficacité de la lutte contre la délinquance, (en référence à la politique sécuritaire de Nicolas Sarkozy dès 2002) doit être satisfaite '' depuis 2009 '' avec des moyens en diminution et une hausse des dépenses de rémunérations. Les sages éreintent l'organisation et la gestion des effectifs de sécurité publiques qui ''se fait par objectifs en fonction des statistiques''.
Le rapport fustige l'état statistique des deux forces, notant au passage qu'en 2009 la reprise à la hausse de la délinquance a été évitée en grande partie par le refus d'enregistrer des plaintes pour escroqueries. La baisse a résulté, selon les sages, du fort recul des vols d'autos et de dégradations de biens privés.
Côté chiffres, la cour des comptes relève une hausse des effectifs sur 2002-2010 suivie d'une diminution égale. Au final, la Cour comptabilise une baisse de 5,3% depuis le 1er janvier 2003 du nombre de policiers et 25% de leurs budgets de fonctionnement (hors rémunérations) en 2010.
Le rapport stigmatise le ''rôle grandissant des polices municipales'', (+35% sur la période analysée, beaucoup plus que les forces de l'Etat). Le ''développement rapide mais coûteux'' de la vidéosurveillance est mis en cause. La Cour a des doutes sur les chiffres de celui-ci. (20.000 caméras annoncées en 2008 alors qu’elles n'étaient que 10.000 pour la Cour. Les sages plaident pour une réforme de l'organisation des forces ''en profondeur'' et un ''nouveau partage territorial''.
Dans sa réponse, le ministère de l'Intérieur est particulièrement sévère fustigeant des ''inexactitudes, erreurs d'analyse, oublis, manque ''d'objectivité'' et ''sous-entendus contestables''. Les auteurs sont taxés d’une appréciation sur ''une période limitée'', niant les accusations et mettant en avant l''effort de mobilisation'' de ses troupes ''recentrées sur leur cœur de métier''.
Le 7 juillet, sur RMC-BFM TV, face à Jean-Jacques Bourdin, le ministre de l’Intérieur a confirmé sa colère en termes peu élogieux à l’égard des sages de la Cour des Comptes. Il annonce plus de policiers et gendarmes mais dit qu’il n’y aura aucun moratoire sur la RGPP et qu’un fonctionnaire sur deux partants à la retraite ne sera pas remplacé. La seule explication qui vaille c’est que ces augmentations d’effectifs se feront à partir des auxiliaires (anciens emplois jeunes remis au goût du jour). Il affirme toujours pouvoir compenser avec une meilleure gestion et une meilleure répartition des tâches. Prenons acte de ce qu’il renonce à dissoudre de nouveaux escadrons de gendarmerie mobile devenu inutiles (pour l’instant) selon lui car il n’y a plus de troubles sociaux. Le réveil risque d’être rude d’autant plus que les mouvements sociaux dans les banlieues sont toujours à la limite de l’explosion.
Le ministre compare les résultats de 2001 à ceux de 2011 et s’en satisfait. Cette méthode, parfaitement rôdée, qui consiste à comparer ces deux années de référence serait moins attrayante pour lui si l’on faisait une graphique année par année avec les chiffres de la délinquance et ceux des effectifs. On pourrait se rendre compte que depuis quelques temps, avec la casse du service public de sécurité, les statistiques (même à partir de chiffres arrangés) ne seraient pas très avantageuses pour le pouvoir en place et on pourrait comparer l’efficacité en matière de sécurité du ministre Sarkozy par rapport au Président du même nom. Lorsque l’on compare 2010 à 2011 cette tendance se confirme, moins 26,3 % de garde à vue, moins
9 % de faits élucidés et moins 11% de personnes mises en cause.
Soyons sûr que le ministre de l’Intérieur fonde beaucoup d’espoir dans le rapport que doit rendre le Sénat sur les conséquences de la RGPP. Si après les sages de la Cour des Comptes, les sages du Sénat se mettaient à critiquer également les résultats de la politique de sécurité, ce serait deux revers cinglants. Il faut se rappeler qu’à l’occasion de leurs auditions ni le directeur de la police, ni celui de la gendarmerie n’étaient réellement enthousiastes.
En conclusion l’association gendarmes et citoyens constate, comme d’autres, que la RGPP et la réforme judiciaire amène des résultats particulièrement dévastateurs pour la sécurité des Français, ce qu’elle avait dénoncé depuis longtemps. Malheureusement, vu les intentions de poursuivre les réductions d’effectifs et les coupes sombres dans les de budgets il est évident que cette dégradation va se poursuivre rapidement.
Christian Contini
D’autres éléments sur le site de l’association Gendarmes et citoyens
http://sites.google.com/site/assogendarmesetcitoyens/et dans son magazine gratuit de juillet :
http://issuu.com/agecassociation/docs/agec_magazine_aout_2011